Je viens de revoir Salt récemment, et j’aimerais parler de mon enthousiasme pour ce film. Lors de sa sortie cinéma, j’en étais sortie toute guillerette sans vraiment savoir pourquoi, vu que les films d’action, j’en suis revenue, il faut plus qu’une simple histoire de contre-espionnage pour m’émoustiller. Je viens subitement de réaliser ce qui m’avait plu.
Je crois bien avoir flashé sur l’héroïne. Pas parce qu’elle est belle, non non, justement. Laissons de côté la plastique de rêve d’Angelina Jolie pour une minute.
Il faut savoir que les différences entre les rôles féminins et masculins est un sujet épineux dans le domaine du cinéma. Les films d’action sont depuis toujours, en général, des films de « mecs », avec de gros durs dégoulinants de sueur, de la bidoche au kilo et l’odeur de la testostérone et des douilles fumantes de la mitrailleuse que l’on renifle à des kilomètres. Les femmes, dans ces films, ce sont des petites choses fragiles tout juste bonnes à se faire sauver des méchants, afin de recevoir le digne baiser du héros à la fin (ou plus si affinités). Ce ne sont d’ailleurs pas les films comme The Expendables, qui ressuscitent le film d’action des années 80 avec dix fois plus d’effets spéciaux et de grands gaillards, qui vont faire tomber ce modèle macho en désuétude.
Pourtant, le cinéma actuel compte de plus en plus des rôles féminins qui tendent non pas à supplanter ces clichés, mais à jouer sur le même terrain qu’eux. Au milieu de toutes ces actrices payées à jouer les potiches décoratives ou les effarouchées hurlantes, on trouve des rôles féminins forts – qui n’ont rien à envier à leurs alter-egos masculins et qui démolit du méchant à tour de bras sans avoir besoin de porter un décolleté.
C’est précisément cet aspect plus objectif qui est plaisant dans Salt.
- 1. L’héroïne n’est pas une bimbo. Elle n’est ni sexy ni enlaidie, elle porte les fringues qui siéent à son activité physique (un pantalon pour courir, un tailleur sobre pour aller au boulot). On n’a pas le droit, pour une fois, au gros plan de caméra lascif qui remonte des pieds jusqu’à la tête pour bien montrer toute la plastique de la dame. On s’en fout.
- 2. La force du personnage ne tourne pas autour de son physique. Il n’y a pas de jeu de séduction. Ce qu’elle sait faire, c’est bastonner, et elle ne s’en prive certes pas. On parle d’elle parce qu’elle représente un adversaire redoutable, pas parce qu’elle est sexy – d’ailleurs je n’ai pas noté la moindre remarque de la part des autres rôles masculins concernant son apparence exclusivement.
- 3. Quand l’héroïne est en position de défaite, elle dérouille. Pas de chichis : il ya du sang, des coups, et des yeux pochés. D’habitude, Hollywood touche rarement aux femmes : avez-vous jamais vu des personnages féminins réellement malmenés dans les films d’action ? Quand on torture une femme, en général c’est deux claques et un seau d’eau. Quand elle prend un coup, ça donne juste une petite rougeur mignonne. Une femme n’est jamais abîmée, encore moins défigurée (ah, une bonne arcade sourcilière ouverte avec le sang en cascade comme seul Bruce Willis sait les faire !). Vraisemblablement parce qu’on n’arrive jamais vraiment à détacher la femme de son rôle de jolie potiche fragile.
Avec le recul, il y a peu d’héroïnes de cette trempe encore à l’heure actuelle, mais il semblerait qu’on y vienne. Dans Salt, Angelina Jolie n’est d’ailleurs pas encore au top de ce nouveau genre de rôle féminin.
Car le rôle féminin « fort » reste dans l’imaginaire populaire la femme fatale, la « fausse » guerrière qui bouge un peu mais reste sexy quand même, garde sa facette de séductrice et ne laisse jamais le sang gâcher son fond de teint. Ce qui, il faut bien l’avouer, finit par gonfler un peu quand on est spectatrice. Surtout qu’on en trouve à la pelle : des James Bond Girl, des Lara Croft, des Catwomen, des Milla Jovovitch (qui a fait de la potiche armée jusqu’aux dents sa marque de fabrique), des super-héroïnes arborant fièrement leurs porte-jarretelles en latex…
Ça devient agréable de tomber de temps en temps sur cet autre visage de l’héroïne sans peur et sans reproche, celui des icônes dopées à l’adrénaline qui ont brûlé leur soutien-gorge et laissé leurs talons-aiguilles au placard pour enfiler les rangers, et qui ne sont pas des symboles hyper sexualisés :
- Sigourney Weaver dans Alien, Aliens et Alien3 (incontournable) ;
- Demi Moore dans G.I. Jane ;
- Michelle Yeoh dans Wo hu cang long (ok, pas de rangers ici, mais un personnage féminin guerrier intéressant) ;
- Michelle Rodriguez dans Resident Evil (qui ne fait pas la chasse aux zombies en robe du soir) ou plus récemment dans Battle: Los Angeles ;
- Hillary Swank dans Million Dollar Baby ;
- Linda Hamilton en mythique Sarah Connor dans Terminator : Judgement Day, où il est d’ailleurs très intéressant de découvrir sa transformation par rapport à son rôle de potiche dans le premier Terminator ;
- etc.
J’aime le cinéma sous (presque) toutes ses formes, mais quand il se met un peu au féminisme, ça fait quand même du bien.